vendredi 9 novembre 2007

Jean-Philippe Gagnon





(1980)
depuis cette absence présence miroitée
je ne suis plus seul

la nuit d'un autre en moi
a pris l'apparence de deux oiseaux
navigant immobiles
côte à côte dans mon sang
Comment peut-on vivre la séparation de la naissance, lorsque de deux jumeaux arrivant à terme, l'un vit, et l'autre non ? C'est la question qui soulève la quarantaine de poèmes composant ce premier recueil, et confère à celui-ci sa belle unité.
Rien de funèbre pour autant chez Jean-Philippe Gagnon : sa voix d'Orphée fait oeuvre de lumière, interpelant avec douceur "cette force que je nomme frère" :
j'ouvre à claire-voie
cette nuit de pierre et de phares

je tire mon ombre à la lumière

silences
Une belle maîtrise de la langue, tout en simplicité, mais jamais prise en flagrant déli d'indigence, renforce la maîtrise de la pensée. Progressivement, le dialogue avec l'absent devient un entretien avec soi-même :
j'apprends à dormir dehors
écho sans origine
devenant chaque nuit
frontière

je récite tes rêves
dômes percés de jour
On aimerait que tous les premiers recueils soient autant décantés, aussi voulus, aussi irréfutables que celui-ci - et, pour finir, aussi beaux.
Jean-Marie Perret
  • Jean-Philippe Gagnon, Frères d'encre et de sang, l'Hexagone, 2007 (Diffusion en France : Librairie du Québec.)

1 commentaire:

Soeur a dit…

WOW, quel artiste! On a intérêt à se procurer ce recueil car demain cet écrivain sera un grand!